Chère lectrice, cher lecteur,

Le rire est un formidable nettoyant intérieur.

Mieux qu’un médicament, mieux qu’un baume, mieux qu’un cataplasme contre la douleur, c’est un élément de profonde régénération intérieure, dont on commence à comprendre l’incroyable bienfait sur l’ensemble du corps.

Le journaliste américain Normans Cousins a raconté dans un livre (« Anatomie d’une maladie »), comment le rire l’avait…sauvé.

Son médecin traitant, qui lui avait diagnostiqué une spondylarthrite ankylosante – une maladie dégénérative qui conduit à une rigidité progressive des articulations – lui avait donné une chance sur cinq de retrouver la santé.

Et l’affaire, il faut dire, était mal engagée :

Cousins ressentait des douleurs de plus en plus vives, avec tellement de difficultés à bouger ses membres qu’il ne pouvait même plus se retourner dans son lit.

Des nodules granuleux commençaient à apparaître sous sa peau et, au pire moment de sa maladie, il ne parvenait presque plus à ouvrir sa mâchoire.

Et c’est là que le déclic est venu.

Norman Cousins était en effet convaincu que sa maladie était en partie liée…à un « état émotionnel négatif persistant » :

« Il en vint à la conclusion qu’un état émotionnel plus positif pourrait inverser les dommages ».

« Cousins entreprit ainsi un régime basé sur des doses massives de vitamine C ET sur le visionnage intensif…de films comiques ».1

Il constata que dix minutes de rire à gorge déployée lui procuraient deux heures de sommeil sans douleur !!!

Un eldorado, au stade de douleur où il en était.

Et à force de rire (et de vitamine C), Normas Cousins retrouva la santé

Comment ?

Le rire qui soigne : l’explication scientifique

Le thérapeute Joe di Spenza propose l’explication suivante : « le changement d’attitude de Norman Cousins a entraîné une modification de sa chimie corporelle, ce qui a modifié son état interne, lui permettant ainsi d’activer de nouveaux gènes d’une manière entièrement nouvelle » ;

Le pouvoir de rire serait-il vraiment si puissant !?

De nombreuses années plus tard, des travaux de recherche menés à l’université de Tsukuba, au Japon, ont obtenu des résultats analogues.

Dans une étude sur des patients atteints de diabète, ceux parmi eux qui regardaient une émission comique pouvaient réguler à la hausse 39 gènes, dont 14 étaient reliés à l’activité des cellules dites « tueuses naturelles».

Bien qu’aucune de ces cellules n’ait été directement impliquée dans la régulation du glucose sanguin, les taux de glucose sanguin des patients étaient mieux contrôlés lorsque ceux-ci visionnaient une émission comique que lorsqu’ils suivaient une conférence sur le diabète.

Les chercheurs émirent l’hypothèse que le rire exerce une influence sur de nombreux gènes impliqués dans la réponse immunitaire, qui à leur tour contribuent à un meilleur contrôle du glucose sanguin.

En fait, c’est tout l’organisme qui bénéficie de cette impressionnante vague bénéfique déclenchée par le rire :

Le rire possède une puissante action apaisante, qui se traduit par une diminution du taux d’hormones du stress circulant dans l’organisme, comme le cortisol et l’adrénaline2.

Ainsi, des patients anxieux qui ont suivi deux séances par semaine de thérapie du rire pendant six semaines ont vu une réduction nette de leur niveau d’anxiété, et une amélioration de la qualité de leur sommeil3 !

D’autres études ont également souligné les bienfaits du rire pour la mémoire4 ou la santé cardio-vasculaire, avec un risque de maladies cardiaques et des AVC plus élevés chez ceux qui ne rient jamais, ou presque5.

Les « Lazlo Carreidas » de Tintin : 

Si vous en avez autour de vous, pensez à leur santé, racontez-leur vos meilleures blagues. 

Dites-leur aussi que la science a montré que le rire est un antidouleur avéré : le phénomène a été observé en laboratoire par une équipe de l’Université d’Oxford, pour qui une seule minute de rire est aussi efficace contre les douleurs qu’un comprimé chimique6.

Bien. Maintenant, ce n’est pas le tout de théoriser, il faut passer à la pratique.

Certains thérapeutes proposent des « exercices de rire », pour ceux qui démarrent, à pratiquer seul ou en groupe…

  • Le rire Hahaha: étirez-vous, bâillez, faites un cri de Tarzan (ou Jane), souriez doucement, inspirez et remplissez-vous d’air puis lâchez doucement le son : ha, haha, hahaha. Recommencez et faites-le avec de plus en plus de conviction jusqu’à ce qu’un vrai rire s’installe.

Comme dans le yoga du rire, méthode développée par le médecin indien Madan Kataria et où le rire est d’abord intentionnel puis devient naturel et contagieux, l’idée est que « l’action entraîne l’émotion » et l’idée qu’il pourrait augmenter la production des endorphines dans le cerveau, qualifiées d’hormones de bonheur.

  • Le rire du cœur : riez en levant les bras, paumes des mains levées vers le ciel, la tête penchée en arrière. Vous sentez le rire venir du fond du cœur.
  • Le rire du téléphone portable : vous tenez dans votre main un téléphone portable imaginaire et vous vous déplacez vers les autres, tout en mimant une conversation hilarante.
  • Le rire graduel : commencez par un sourire franc, bouche entrouverte, en y ajoutant petit à petit des gloussements ou de petits rires espiègles, dont vous augmentez graduellement l’intensité. À ce stade, tous les membres sont prêts à éclater d’un rire vrai, pendant plusieurs secondes. Puis, réduisez petit à petit le rire, jusqu’à son arrêt complet. Ce rire peut durer plusieurs minutes.

A titre personnel je suis plutôt partisan de la « méthode » Norman Cousins, qui consiste à regarder des films comiques.

Mais vous pouvez aussi voir des compilations de fous rires sur internet (ça marche presque à tous les coups), vous déguiser, faire la chenille (celle qui redémarre) ou imiter le cri du canard en arrivant dans votre centre des impôts (avec toutefois un risque sérieux de redressement fiscal).

Bref, faites absolument ce que vous voulez mais rigolez de bon cœur, le plus souvent que vous pouvez.

Car pour être en bonne santé, il faut certes manger bio, des légumes, des fruits, pas trop de viande, des bonnes graisses, surveiller son taux de vitamine D, de zinc, de magnésium, il faut marcher, prendre des bains de forêt, des compléments d’oméga-3 et un multivitamines, il faut bien dormir, prier ou méditer, mais il faut surtout rire et aimer la vie, cultiver le sens de l’humour, qui est comme disait Wolinski « le plus court chemin d’un homme à l’autre »…

Santé !

Gabriel Combris

1. Raconté dans Joe di Spenza, Le placebo, c’est vous.

2. Berk LS et al. Neuroendocrine and stress hormone changes during mirthful laughter. Am J Med Sci. 1989 Dec;298(6):390-6.

3. Fariba Ghodsb et al. The Effects of Laughter Therapy on General Health of Elderly People Referring to Jahandidegan Community Center in Shiraz, Iran, 2014: A Randomized Controlled Trial. Int J Community Based Nurs Midwifery. 2015 Jan; 3(1): 31–38.

4. Bains GS et al. The effect of humor on short-term memory in older adults: a new component for whole-person wellness. Adv Mind Body Med. 2014 Spring;28(2):16-24.

5. Hayashi K. Laughter is the Best Medicine? A Cross-Sectional Study of Cardiovascular Disease Among Older Japanese Adults. J Epidemiol. 2016 Oct 5;26(10):546-552. Epub 2016 Mar 12.

6. http://rspb.royalsocietypublishing.org/content/279/1731/1161