Chère lectrice, cher lecteur,

Les arbres, sur cette photo, vous les rasez…ou vous les gardez ?

Il y a 50 ans, le président Georges Pompidou regrettait pour sa part que « les arbres n’aient pas de défenseurs » et qu’ils se fassent « détruire systématiquement » dans « une profonde indifférence »

« La France, ajoutait-il, n’est pas faite uniquement pour permettre aux Français de circuler en voiture, et, quelle que soit l’importance des problèmes de sécurité routière, cela ne doit pas aboutir à défigurer son paysage. Il faut sauvegarder tous les arbres plantés en bord de routes ».

Je suis bien de son avis.

Mais cinquante ans plus tard, malgré la prise de conscience écologique, les coupes d’arbres continuent et au cœur de l’été, certains – dont la Ministre de l’écologie !!!…– s’activent dans les coulisses pour couper plus et plus vite1.

Voici ce qu’écrit le site internet Reporterre.net :

« Dernière attaque contre les arbres ? La loi « 4 D » débattue depuis mercredi 7 juillet au Sénat. Le gouvernement a profité de ce texte sur la décentralisation pour introduire une disposition complètement hors sujet qui vise à « simplifier » l’abattage des arbres d’alignement, qui bordent nos routes et nos boulevards. »

« L’exécutif souhaite introduire de multiples dérogations pour faciliter l’abattage des allées d’arbres en cas de travaux. C’est un petit article, glissé en douce, noyé au milieu de quatre-vingt-trois autres, perdu dans le flot des propositions. »

Désormais, ce serait le seul préfet qui déciderait du sort des arbres face à des projets d’aménagement.

Autant dire qu’on sait déjà ce qui se passerait :

AVANT APRES

Et pourtant, que ces arbres sont précieux !

Non seulement pour leur rôle d’ornement mais aussi parce qu’ils stabilisent les sols, purifient l’air et atténuent les îlots de chaleur. De plus, ils sont souvent âgés et abritent un biotope particulier.

Alors raser plus…Raser plus vite…est-ce vraiment la bonne idée ???

« Un arbre humanise mieux le paysage que ne le ferait un homme »

Dans le fond, ces tristes manigances au nom du « développement économique » traduisent des questions essentielles :

Qu’est-ce qu’un arbre ? Qu’est-ce qu’une plante ? De simples ressources, dont on disposerait à sa guise ?

Rien de plus, vraiment ? 

Je crois au contraire que nous avons tous, gravé dans notre mémoire, notre arbre.

Celui qui jaillit comme une évidence quand on pense à « un » arbre en particulier. 

Faites le test, autour de vous. Demandez à quelqu’un de vous parler de son arbre. Ce sera le chêne d’une vieille cour de récréation, le saule qui borde la rivière où on pique-niquait en famille.

Ce sera un pin immense, un tilleul ou un petit bonsaï.

Ce sera un arbre majestueux ou tout simple, centenaire ou adolescent. Mais pour chacun de nous, c’est notre arbre. 

Peut-être parce que, comme l’écrivait Gilbert Cesbron, il arrive parfois qu’« un arbre humanise mieux un paysage que ne le ferait un homme ».

Personnellement, mon arbre, c’est un sureau noir (Sambucus nigra, de son nom savant). Celui qui est au milieu de mon jardin.

Et pourtant, il est moche !

Pour tout vous dire, il est assez moche avec son tronc sans écorce et ses longues branches maigres au bout desquelles surgit une abondante chevelure de feuilles.

Pourtant quand je pense à un arbre, c’est lui ! Je revois mes enfants en train de le grimper dans une position totalement impossible, défiant de loin les lois de la gravitation.

Aujourd’hui, ils ne grimpent plus aux arbres, mais à l’époque, aucun n’est méchamment tombé… 

Est-ce parce que la légende dit du sureau que c’est l’arbre à fées, celui où elles se cachaient pour chasser les esprits du mal.

C’est pour cela d’ailleurs qu’on en plantait très souvent près des maisons (aussi parce qu’on utilisait ses fleurs et ses baies pour préparer tisanes et sirop contre les infections et stimuler l’immunité).

Mystère…Mais c’est mon arbre. Et je parie que vous aussi, vous avez le vôtre.

Les arbres contre…le covid !!!

Avez-vous déjà croisé, au hasard d’une promenade en forêt, un de ces curieux personnages qui enroulent leurs bras autour du tronc, et se mettent littéralement à « embrasser les arbres » ?

Eh bien, c’est une pratique moins fantaisiste qu’il y paraît.

D’abord il faut se rappeler que les arbres ont toujours tenu une place très importante dans les religions et civilisations anciennes. 

La science aujourd’hui commence à se souvenir des bienfaits pour notre santé de ces moments de bonheur simple, et on regarde avec de plus en plus d’intérêt ce qui se pratique, notamment au Japon sous le nom de Shinrin-yoku, ou « bain de forêt », avec des effets très intéressants sur la santé :

« En 1995, (les chercheurs) Miyazaki et Motohashi ont été les premiers à mesurer les effets physiologiques de la pratique du Shinrin Yoku. »

« Ils ont observé que des sujets qui passaient 40 minutes en forêt le matin et l’après-midi voyaient une diminution de leur score pour 5 indicateurs : la tension, la dépression, l’anxiété, la fatigue et la confusion. »

« De plus, leur taux de cortisol salivaire avait diminué par rapport aux conditions de laboratoire, ce fut la première fois que l’effet déstressant du Shinrin-Yoku était mesuré. »2

Aujourd’hui il existe au Japon plus de 60 centres officiels de « sylvothérapie » (soin par les arbres) et les autorités japonaises ont débloqué des fonds importants pour étudier les bienfaits de cette pratique, démontrés sur le côlon irritable, le diabète ou encore les douleurs d’estomac ont également été scientifiquement démontrés3.

En France…rien sur le sujet. Mais les choses pourraient changer.

Récemment, la neurologue Giovanna Borriello a montré qu’un cycle d’immersion en forêt d’un jour par semaine pendant six semaines4 était bénéfique en cas de séquelles pulmonaires liées au covid, et même de sclérose en plaques !

Pour le dire simplement, les arbres, c’est la santé, c’est la vie.

Grands hêtres, chênes, charmes, peupliers, etc. tous ces arbres de France dont les feuilles bruissent avec le souffle du vent…ils sont notre précieux patrimoine à TOUS.

Ils sont les arbres de notre passé, et celui du futur de notre planète.

Ils sont les arbres qui nous rappellent les êtres aimés, les vivants et les morts. 

Ils sont aussi les arbres que l’on plante pour l’avenir, pour les voir pousser avec les générations qui nous suivront.

Alors en définitive : qui sont les fous ? Ceux qui veulent les raser à tout prix, ou ceux qui préfèrent les embrasser ?

Santé !

Gabriel Combris

 

Sources : 

1. https://reporterre.net/En-catimini-le-gouvernement-facilite-l-abattage-des-arbres-d-alignement

2. http://www.hinnovic.org/le-shirin-yoku-ou-la-nature-comme-medecine-preventive/

3. Pr. Miyazaki., Shinrin YokuShinrin Yoku, le secret de santé naturelle des Japonais, éditions Trédaniel

4.https://www.repubblica.it/salute/2021/04/04/news/un_bagno_si_ma_in_mezzo_al_bosco-294666871/