Chère lectrice, cher lecteur,

Dans les films sur la mafia, il y a presque toujours un moment où la caméra s’approche doucement, de l’arme qui vient juste de tirer.

L’image se fixe sur le pistolet…qui fume encore.

Et le spectateur comprend le message : ce n’est que le début.

Il vient d’assister au crime originel, celui qui va en entraîner d’autres. Beaucoup d’autres.

Eh bien un pistolet fumant, il y en a peut-être un aussi à l’intérieur de votre corps !

C’est ce qu’on appelle le syndrome de l’intestin perméable, qui est lui aussi à l’origine d’une multitude d’autres pathologies.

Aujourd’hui ce sont en effet près de 200 maladies qui naissent, se développent et prospèrent à partir d’une seule et même origine, le déséquilibre du microbiote intestinal :

les maladies digestives chroniques, bien sûr, mais aussi les maladies inflammatoires, les maladies liées au métabolisme (diabète, hypertension, obésité), les maladies de la peau ou encore les maladies infectieuses ou même certains cancers (côlon)[1].

Le tueur, dans l’intestin, tire en rafale

Pourtant quand tout fonctionne bien, l’intestin joue son rôle de barrière filtrante, laissant passer les nutriments essentiels et interdisant l’entrée dans les tissus et la circulation sanguine à de nombreux agents pathogènes.

Mais l’équilibre est fragile :

Tout au long de l’intestin, qui mesure six à sept mètres, une « population bactérienne essaie de se maintenir dans un équilibre de 85 % de bonnes bactéries et 15 % de mauvais microbes. Ce microbiote agit comme une doublure de la paroi intestinale, qui empêche les microbes nuisibles de s’installer »[2].

Les cellules de la barrière intestinale sont reliées entre elles par un mécanisme vivant que l’on appelle les jonctions serrées.

Et c’est en l’an 2000 que le Dr Alessio Fasano, de l’Université du Maryland, a fait une découverte absolument déterminante : il a identifié LA substance physiologique qui contrôle directement les jonctions serrées dans la paroi intestinale.

Opérations « portes ouvertes » dans l’intestin

Son nom ? La zonuline.

Cette substance est produite par les cellules de l’intestin elles-mêmes en réaction à une attaque.

Et lorsque le taux de zonuline monte, les jonctions serrées se désolidarisent, c’est le trou d’air.

Voilà le « pistolet fumant ».

« Depuis des millénaires, cette action de la zonuline était une partie essentielle du mécanisme corporel de défense, explique le médecin nutritionniste américain Josh Axe : c’était une manière de débusquer les mauvaises bactéries, comme la salmonelle par exemple. »

Seulement notre monde moderne a augmenté dans des proportions considérables le nombre de « déclencheurs de zonuline », ouvrant de plus en plus grand les portes de notre intestin.

Notre alimentation trop industrielle, les produits chimiques que nous utilisons, notre niveau de stress trop élevé, les médicaments que nous surconsommons représentent des « micro-expositions toxiques qui conduisent à l’émission de zonuline »

Vous connaissez déjà les facteurs les plus importants susceptibles d’augmenter l’émission de zonuline : le gluten, et les antibiotiques.

Pour le gluten, il suffit de regarder la composition des aliments industriels pour comprendre qu’il est encore aujourd’hui massivement utilisé, « ce qui crée les conditions dans l’organisme d’une production quasi-constante de zonuline ».

Et donc de perméabilité intestinale …

Idem avec l’utilisation régulière de médicaments chimiques et des antibiotiques, dont le « développement, comme celui des désinfectants pour les mains, de nettoyants chimiques et autres tueurs de microbes a décimé notre diversité microbienne.

« Le déséquilibre dans notre flore intestinale a conduit à une prolifération des (mauvaises) bactéries dans notre intestin grêle, qui sans cesse déclenche le mécanisme d’ouverture par la zonuline.»

Parmi les autres coupables, on peut aussi citer la caséine des laitages, l’alcool, le sucre ou encore les glucides raffinés.

Maintenant, que faire pour que le pistolet arrête de tirer ?

Signature du cessez-le feu

Le premier conseil évident est d’éliminer de votre alimentation les grands « perturbateurs intestinaux » : en plus de ceux que nous avons cités plus haut, on peut ajouter le stress, dont une étude de 2014 parue dans la revue Gut[3] a montré qu’il augmentait considérablement le risque de perméabilité intestinale.

Sur le sujet, j’avoue qu’il n’y a rien de plus stressant que quelqu’un qui vous dit « arrête de stresser »…

Comme si c’était facile et qu’il suffisait de le décider…

En attendant, je veux juste signaler quelques pistes qui ont montré une réelle efficacité pour réduire le niveau de stress émotionnel : les massages, qui réduisent le niveau de cortisol (hormone du stress), la réflexologie, l’activité physique, une tisane de camomille, de valériane ou de passiflore, certaines huiles essentielles comme l’ylang-ylang ou la lavande, un complément de magnésium (500 mg par jour), la lecture, la poésie, éteindre son poste de télévision, etc.

Ensuite, vient l’étape du « colmatage ».

Les chercheurs ont montré l’effet bénéfique des probiotiques sur la santé en général (minceur, protection cardio-vasculaire, immunité, santé mentale, etc) mais aussi directement sur le conduit gastro-intestinal et la perméabilité intestinale (Bifidobacterium bifidum, Bifidobacterium breve, qui aide à la prolifération d’une flore saine et évacue les mauvaises bactéries, etc.)

Les probiotiques sont naturellement présents dans les yaourts, le lait fermenté, le kéfir, la choucroute crue et même les olives.

La L-glutamine est l’un des meilleurs compléments contre la perméabilité intestinale. Une étude du Lancet sur des patients en phase post-opératoire a notamment montré que l’utilisation de L-glutamine en complément a aidé à maintenir la santé et la longueur des villosités intestinales, ainsi qu’à préserver la muqueuse et à prévenir l’aggravation de la perméabilité intestinale. Le Dr Axe suggère une prise de 5 g par jour 2 fois par jour.

Le collagène, que l’on trouve abondamment dans le délicieux bouillon d’os, contient les acides aminés proline et glycine, deux éléments essentiels pour réparer la paroi intestinale endommagée.

L’encens (Boswellia serrata) est prescrit depuis des siècles par les médecins ayurvédiques pour calmer toutes sortes de maladies inflammatoires.

Aujourd’hui, les chercheurs ont validé son efficacité sur les pathologies intestinales difficiles à soulager par les médicaments, telles que la colite chronique[4] et ulcéreuse[5] ou la maladie de Crohn[6].

Une étude de 2015 dans PLoS ONE a montré qu’il protège les jonctions serrées de l’intestin.

Pour démarrer une cure, vous pouvez commencer par 300 à 400 mg de résine à raison de 3 fois par jour. Sur prescription d’un thérapeute, la dose pourra atteindre 1500 mg 3 fois par jour, la durée de la cure s’étalant généralement sur 6 à 12 semaines.

Enfin, n’oublions pas les enzymes digestives, qui « décomposent entièrement protéines, acides gras, sucres et amidons, et peuvent réduire l’inflammation intestinale ». Il faut alors rechercher des compléments d’enzymes digestives qui contiennent :

  • de la protéase, pour décomposer les protéines (comme le gluten)
  • de la lipase, qui décompose les graisses
  • de la lactase, qui décompose le lactose des produits laitiers.

Santé !

Gabriel Combris


Source :

[1] http://www.greenmedinfo.com/substance/probiotics

[2] Dr Josh Axe, Salement bon pour la santé. P.66

[3] https://gut.bmj.com/search/stress%20jcode%3Agutjnl

[4] Gupta I1, Parihar A, Malhotra P, Gupta S, Lüdtke R, Safayhi H, Ammon HP. Effects of gum resin of Boswellia serrata in patients with chronic colitis. Planta Med. 2001 Jul;67(5):391-5.

[5] Gupta I1, Parihar A, Malhotra P, Singh GB, Lüdtke R, Safayhi H, Ammon HP. Effects of Boswellia serrata gum resin in patients with ulcerative colitis. Eur J Med Res. 1997 Jan;2(1):37-43.

[6] Gerhardt H1, Seifert F, Buvari P, Vogelsang H, Repges R. [Therapy of active Crohn disease with Boswellia serrata extract H 15]. Z Gastroenterol. 2001 Jan;39(1):11-7.