Chère lectrice, cher lecteur,

« Celui qui n’a pas le ventre en ordre pense de travers »…

Ainsi parlait Lao Tseu…et le moins qu’on puisse dire est que notre ami était visionnaire, tant la thérapie par le microbiote est en passe de devenir le traitement standard pour une immense majorité de maladies.

Si vous souffrez de douleurs articulaires, si vous êtes sujet à des infections à répétition ou à une fatigue qui perdure, avec des ballonnements ou du surpoids, c’est peut-être « D’ABORD un problème digestif qu’il convient de régler » explique ainsi le gastro-entérologue Bruno Donatini.

Et quoi que vous fassiez, ostéopathie, prise de compléments alimentaires, etc. les améliorations ne seront pas durables tant que votre flore ne sera pas assainie.

Un ventre en ordre pourrait aussi soigner des maladies pour lesquelles on ne soupçonnait pas qu’elles puissent avoir un lien avec le microbiote intestinal :

  • Des études présentées en 2018 à la conférence de l’Association Internationale sur Alzheimer, ont montré que certaines bactéries intestinales pourraient « promouvoir la formation de plaques de protéines dans le cerveau», ce qui est fondamental car la maladie d’Alzheimer se caractérise par l’accumulation de protéines amyloïdes et tau dans le cerveau[1].
  • D’autres chercheurs ont montré qu’un changement alimentaire entraînant une flore bactérienne nouvelle pouvait réduire les plaques amyloïdes, diminuer l’inflammation et améliorer la mémoire !!!
  • C’est la même chose avec le cancer, pour lequel des recherches ont établi que certaines espèces bactériennes étaient en cause. (C’est le cas notamment dans le cancer du côlon, associé aux bactéries Fusobacterium).

Cela va même plus loin encore :

En mars 2019, une équipe de chercheurs américains de l’université du Colorado (USA) a montré que lorsque la flore intestinale s’abîme, nos artères et tout notre système vasculaire vieillissent.

Et à l’inverse, lorsqu’on a un microbiote riche et diversifié, le risque de maladies cardiovasculaires devient faible et… l’espérance de vie s’allonge.

Pour cette équipe de pionniers du microbiote, leur découverte tient dans cette phrase choc :

« La fontaine de jouvence pourrait vraiment se trouver dans notre ventre »

Vous voyez à quel point un microbiote équilibré est un « actif stratégique » dont il faut prendre un soin méticuleux.

Comment ? D’abord en évitant de mettre notre intestin à trop rude épreuve. Pardon pour les « banalités », mas cela signifie qu’il faut :

  • Éviter les repas trop copieux. Privilégiez les petites portions, et de préférence à des heures régulières .
  • Bien mastiquer. Le travail fait par les dents et les enzymes de la salive ne sera plus à faire par les organes digestifs.
  • Réduire sa consommation d’aliments difficiles à digérer ou irritants (produits gras et/ou frits, produits industriels, gluten, lactose, poivre…).
  • Boire assez d’eau.

 

Ensuite, un soutien micronutritionnel de l’intestin par des probiotiques permettra de rétablir un bon équilibre du microbiote et de moduler la réponse immunitaire.

Pour prévenir les infections intestinales, les souches les plus actives sont le Lactobacillus plantarum, qui agit sur le mucus intestinal en renforçant notre barrière immunitaire, le Lactobacillus brevis, capable d’empêcher le Prévotella de former des biofilms, et le Lactobacillus rhamnosus GG par sa capacité à augmenter la voie Treg (anti inflammatoire) et à diminuer les voies Th1 et Th17 (voie pro-inflammatoire).

Pour résensemencer la flore intestinale, le naturopathe Christian Brun conseille Lactibiane cnd

  • 10M : 2 gélules par jour avec un grand verre d’eau, avant le repas pendant 7 jours, puis
  • 5M : 2 gélules par jour avec un grand verre d’eau, avant le repas pendant 10 jours puis 1 gélule par jour, à renouveler

 

Dans l’alimentation on trouve d’excellents probiotiques avec les aliments fermentés : choucroute crue, kefir (boisson pétillante faite à partir de lait ou de jus de fruit fermenté), kimchi (chou ou autres légumes fermentés avec du piment), miso (pâte salée faite à partir de soja fermenté), kvas (boisson pétillante faite à partir de pain fermenté dans de l’eau sucrée et de la levure).

Ce qui est moins connu est le rôle essentiel des prébiotiques, qui sont la « nourriture » des bonnes bactéries (probiotiques).

Ils se trouvent essentiellement sous forme de fibres :

  • Les fructo-oligosaccharides : oignon, ail, pissenlit, poireau, salsifis, chicorée, racine de bardane etc.
  • Les galacto-oligosaccharides : haricots verts, choux de Bruxelles, brocolis, asperges, crosnes, petits pois et fèves.
  • Les amidons résistants : châtaigne, gland, et légumineuses (lentilles, pois chiches, pois cassés, haricots blancs, rouges et noirs, etc).

Trois rôles pour un seul acteur !

Je m’attarde juste un instant sur la façon dont ces prébiotiques vont venir en soutien de la flore. Alors malgré un ou deux termes scientifiques de plus de trois syllabes, lisez ce passage, vous allez voir que ces mécanismes sont vraiment fascinants.

D’abord, les prébiotiques jouent un rôle nutritif.

Eux échappent à la digestion dans la partie haute du tube digestif, et arrivent intégralement dans l’intestin et dans le côlon où ils fermentent en totalité sous l’action de la flore intestinale. Ils ont un rôle nutritif autant pour la flore intestinale que pour les cellules intestinales.

 

Ensuite, ils forment une barrière contre les bactéries et les levures « pathogènes ».

Les bifidobactéries de la flore intestinale métabolisent les prébiotiques et produisent de grandes quantités d’acides gras à chaine courte comme le butyrate. Ce dernier acidifie le côlon et limite ainsi la prolifération de nombreuses bactéries pathogènes (en les empêchant de se fixer sur la muqueuse intestinale) tout en stimulant le transit intestinal.

On lui attribue aussi une action préventive contre le cancer du côlon.

Enfin, les prébiotiques jouent un dernier rôle, métabolique.

L’utilisation des FOS par les probiotiques permet la libération de propionate, qui améliore le métabolisme des glucides et des graisses[2].

Conséquence : une diminution de l’absorption intestinale des glucides et des graisses, une réduction de la production de glucose par le foie lorsque nous sommes à jeun.

C’est pour cela que les FOS sont particulièrement utiles dans la prévention de nombreuses maladies cardio-vasculaires et de maladies métaboliques telles que l’hypercholestérolémie, l’hypertension artérielle, l’obésité ou le diabète.

Des études chez l’homme ont démontré qu’une supplémentation de 5 g de FOS par jour améliore la composition de la flore intestinale.

Ce qui n’empêche pas d’associer à cette supplémentation une consommation d’au moins 600 gr de légumes par jour, en particulier carottes, céleris, artichaut, choux, panais, topinambour, navet et asperge[3].

Une thérapie pas franchement enthousiasmante…

Dans les années 2000, des chercheurs ont observé que des souris obèses avaient un microbiote différent de celles qui étaient « normales ».

Et lorsqu’ils ont transplanté la flore de souris minces à ces souris obèses, ces dernières ont réduit leur surpoids !

Ce lien entre flore intestinale et surpoids a depuis été également établi chez l’homme, puisqu’on retrouve une flore appauvrie chez 30% des personnes en surpoids et 75 % des personnes obèses.

Voilà qui nous conduit à l’une des techniques les plus étonnantes aujourd’hui utilisée par les « médecins du microbiote ».

La transplantation fécale.

Une transplantation du microbiote fécal (TMF), consiste à introduire dans le tube digestif d’un malade des matières fécales d’un donneur sain afin de reconstituer la biodiversité de sa flore intestinale.

Plusieurs voies d’administration sont possibles : soit par une sonde insérée dans le nez jusqu’à l’intestin, par coloscopie (sonde est alors introduite au niveau de l’anus) ou par lavements.

Si le procédé n’est pas enthousiasmant, les premiers essais sont très encourageants.

En testant cette méthode pour soigner le côlon irritable, des chercheurs australiens ont obtenu des résultats étonnants, puisque la moitié des patients traités ont vu leur état s’améliorer, et certains ont même été guéris.

Tout récemment la revue The Journal of International Medical Research[4] a publié l’histoire d’un homme de 82 ans atteint de la maladie d’Alzheimer, avec des symptômes de plus en plus lourds (confusion, perte de mémoire, dépression, perte d’indépendance etc.)

Comme de nombreux patients touchés par cette maladie, cet homme recevait un traitement médicamenteux sans aucun effet positif.

Et puis, si on peut dire, il a eu la « chance » d’être atteint d’une autre maladie ; une infection bactérienne aux Clostridioides difficile, bactéries résistantes aux multiples antibiotiques prescrits.

Son médecin a alors décidé de pratiquer sur ce patient une transplantation fécale.

Et, c’est sa propre épouse, saine d’esprit, sans signes et symptômes de déficience cognitive, qui a joué le rôle de donneuse.

Avec des résultats spectaculaires :

Deux mois après avoir lui transplanté un échantillon de microbiote sain, ses performances cognitives ne font que progresser, comme son humeur et son envie d’interaction sociale.

Après six mois, on ne parle plus d’un ralentissement, ni même d’une stagnation, mais bien d’une inversion de la maladie d’Alzheimer.

Actuellement, plus de 200 essais cliniques sont organisés à travers le monde, sur des thèmes aussi variés que le syndrome de l’intestin irritable, le diabète, les maladies auto-immunes ou cardiovasculaires… et même des troubles d’ordre neurologique comme la maladie de Parkinson[5].

La flore a aussi un ennemi invisible

Une étude parue en 2017 montré que l’exposition à de longues périodes de stress peut changer la composition du microbiote et augmenter la perméabilité intestinale.

En réponse, des chercheurs néerlandais ont voulu tester l’efficacité des méthodes de relaxation.

Dans une étude, un groupe de patients recevait des soins standards contre le côlon irritable (laxatifs, antidiarrhéiques, antispasmodique, etc.) alors qu’un autre groupe a participé en plus à quatre séances de relaxation de 90 minutes chacune.

Les conclusions étaient sans appel : aussi bien à court terme qu’à long terme (3, 6 et 12 mois), les troubles intestinaux avaient davantage réduit chez ceux qui avaient suivi les sessions de relaxation.

Ainsi la paix du ventre et celle de l’âme sont-elles intimement liées, comme l’avait si bien compris notre ami Lao Tseu…

Et comme, je crois, nous en sommes tous absolument convaincus !

Santé,

Gabriel Combris

 

Sources :

[1] http://alz.org/aaic/releases_2018/AAIC18-Tues-gut-liver-brain-axis.asp

[2] https://link.springer.com/article/10.1007/s11690-014-0451-8

[3] Dr Vincent Renaud. Revolution Santé Avril 2020.

[4] https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/0300060520925930

[5] Scheperjans F. Mov Disord. 2015 Mar;30(3):350-8. doi: 10.1002/mds.26069. Epub 2014 Dec 5. Gut microbiota are related to Parkinson’s disease and clinical phenotype.